Et maintenant ?

Nombre de messages : 6 Date d'inscription : 21/06/2007

(HRP : Fait suite à : Un monde de chimères
Ce RP est ouvert à tous.)

Elle ouvrit les yeux et l’angoisse la terrassa.
L’appréhension fit place à la réalité. Son corps avait bel et bien été meurtri de toutes parts.
Aveugle, elle l’était et le resterait.

Elle était couchée sur ce qui lui semblait être une paillasse. Elle se redressa et s’assit sur la couche. Une douleur lancinante lui tiraillait les flancs, mais elle était supportable, cette fois-ci. Sans aucune mesure avec ce qu’elle avait enduré… elle se souvint alors du froid, des rongeurs, des armées et une présence, une chaude présence. Mais rien de précis ne lui venait en tête. Tout restait flou. Rien sur ces blessures, sinon des images bien énigmatiques.

Elle palpa son corps avec sa main valide. Elle était habillée d’une longue tunique qui sentait la fraîcheur du propre.
Son autre bras était immobilisé et des bandages enserraient ses côtes. Ses jambes également étaient pansées jusqu’à hauteur des cuisses.

On s’était occupée d’elle.

Elle tâtonna et renversa un objet qui se cassa au sol. Peut-être un pichet d’eau. Sa main heurta un objet dur et mou à la fois. Elle le porta vers sa bouche. Apparemment du pain, du moins à l’odeur et à la texture. Elle mangea en évitant de laisser trop aller son imagination. Peut-être qu’elle mangeait autre chose.

Elle trouva une canne apposée contre la couche.

Avec de pénible effort, elle réussit à se mettre debout. En se guidant avec la luminescence qu’elle percevait sur ses pupilles et au son que faisait la vie à l’extérieur, elle se traîna jusqu’à l’entrée de ce qui pour elle était un cabanon.

Elle s’immobilisa quand elle perçut les rayons de l’astre jour lécher son visage et souffla. Elle se remémora ses songes : les haulnes noires, l’oriflamme, la mariée, la guerre, les dieux, l’épouvantail, le rouge et le noir, les seigneurs d’Athena, les trahisons, les jardins en sang, et plein d’autres encore… jusqu’à pleurer en revoyant ses parents baignant dans une mare de sang, tués par ses mains …. et son corps à elle…. Et lui.

Mais où était la réalité ? Tout se bousculait dans sa tête.

Elle percevait distinctement le chant des zozios. Les bruissements de la brise dans les feuillages.

Elle se laissa bercer par les sons de la nature puis fit quelque pas vers l’extérieur.
Où se trouvait-elle ?

Elle se mit à chantonner la mélopée qui maintenant ne la quittait plus. Elle n’en connaissait plus l’origine, elle ne pouvait dire qui le lui avait apprise, mais cela la réconfortait que de prononcer ces mots.

Il y a très longtemps
Les enfants courraient sur la Lune
Pas une goutte de sang
Ne tachait le miroir de ses dunes

Il y a bien longtemps
Nul besoin de sentinelles
Aux quatre coins des citadelles
Pour sentir d'où venait le vent

Nombre de messages : 6 Date d'inscription : 21/06/2007

La suite des paroles resta en suspens, au bout de ses lèvres. Il y avait une suite, elle en était sûre, mais elle ne s’en rappelait plus.

Elle s’arrêta autant par la fatigue et les douleurs que lui occasionnait la marche que pour se concentrer sur les paroles. Non, cela ne lui revenait pas. Pourtant elle en était sure, elle connaissait les paroles depuis très longtemps, depuis qu’elle était petite….

… petite ? …. Mais où avait-elle grandi ? Elle se rendit compte soudain qu’aucun souvenir de son enfance ne venait assaillir son esprit. A part l’image vague de sa mère la prenant dans ses bras, ses yeux émeraude. A part l’image floue de son père, ses yeux bleus, son sourire, ses baisers et sa barbe… rien. Rien de précis, les contours des visages étaient incertains. Que des impressions. Et puis leurs corps ensanglantés.

Penser à tout cela la fatiguait. Elle devait s’asseoir, trouver une souche ou une pierre. Se coucher au sol était trop hasardeux. Elle avait peur de ne plus pouvoir se relever. Mais comment faire, elle n’y voyait rien. Elle resta immobile se disant qu’elle serait incapable maintenant de retrouver le chemin du cabanon. Mais c’était la seule solution.
Elle se retourna et avança dans la direction qu’elle s’imaginait être la bonne.

De nouveau elle se demanda où elle pouvait bien être et comment diable elle était arrivée dans ces lieux ?

Elle avançait très lentement, en traînant les pieds. Ses jambes étaient raides et commençaient à lui faire mal.

Nombre de messages : 6 Date d'inscription : 21/06/2007

Après de moult efforts, en serrant les dents, elle buta contre une paroi. Elle palpa et reconnut un mur. Elle prit à droite, espérant ne pas se tromper. Elle avançait en frôlant la paroi de son épaule valide. De temps en temps elle s’arrêtait pour être sûre de ne pas passer la porte.

Elle l’atteignit et entra dans ce qu’elle s’imaginait être un cabanon. Elle s’arrêta sur le seuil, essayant de se remémorer à quel endroit se trouvait la couche.

A droite, c’est ça ! A droite !, se dit-elle à haute voix.

Une fois trouvée, elle s’affalât de temps son long. La marche l’avait épuisée.

Son esprit quant à lui voguait et s’interrogeait. Des questions l’assaillaient de toutes parts. Comment expliquer son état ? Elle voyait des images mais étaient-elles vraies ? Avait-elle été torturée ? mais alors pourquoi ?
Et puis qui était-elle ? De son passé ne subsistait que quelques impressions. Mais de nouveau étaient-elles réelles ou le fruit de son imagination ? Avait-elle été heureuse ?

Des larmes coulèrent. S’appelait-elle réellement Hatyâ, Hatyâ Kandâ ? Dans son esprit aucun son, aucune personne qui l’appelait par ce nom ! Personne…. Aucune voix ne résonnait dans sa tête. Pas même de sa mère ou de son père.

Et puis elle n’arrivait même pas à esquisser une image d’elle-même. Comment étaient ses traits ? Quelle était la couleur de ses cheveux ? De ses yeux…..

Sa fatigue était telle que bientôt le sommeil la terrassa.

Elle le vit alors s’approcha et s’asseoir à ses côtés. Il lui caressa le visage, épongea ses larmes, en murmurant, d’une voix triste :

Il y a trop longtemps
Qu'on n'a pas eu le goût du fer
Une langue de feu entre les dents
Pour aiguiser nos prières

Et puis il ricana.
Elle fit la moue, fronça ses sourcils. Elle voulut hurler, mais aucun son ne sortit de sa bouche.
Elle était pétrifiée.

Un éclair bleu scintilla entre ses cornes.

Finalement il se leva, resta un instant à la regarder, passa une dernière fois ses plumes sur son visage et il s’envola dans un bruissement d’ailes.

Elle vit alors l’oriflamme rouge et noir qui flottait sur la citadelle.

Beau parleur Nombre de messages : 433 Date d'inscription : 04/03/2007

HRP : pour savoir ce qu'est la fleur des rêves, se référer au concours RP du mois d'octobre

*Elle a l'air de se remettre mais reverra-t-elle un jour ? Ah que de mystères semble porter cette femme et combien de douleurs... Pas une nuit elle n'a connu de sommeil paisible. Cela n'a été qu'une longue succession de plaintes, de gestes saccadés, de mots incohérents jetés à la cantonnade. Il est miraculeux qu'elle se rétablisse en trouvant si peu le repos...

J'ai bien fait de la mettre à l'écart dans cette cabane et de demander à Stella de veiller sur elle. Sa présence aurait fait jaser dans Babylone. Nul ne sait d'où elle sort et qui elle est, il valait mieux éviter qu'on la remarque... Qui sait quel ennemi peut la pourchasser ou vouloir lui nuire. Et puis Babylone a suffisament de querelles pour ne pas ajouter celles des autres à la liste des siennes.

Tiens, elle peut marcher... la fleur des rêves a réellement un pouvoir prodigieux, il faut que j'en parle à Lanitz et Jade, nous devons généraliser sa culture. Tous les afterendiens doivent avoir accès à cette merveille. Elle semble presque ignorer qu'elle souffre...*

Altea était assise sur la fourche d'un saule d'un âge vénérable qui avait gardé ses feuilles malgré la saison. L'air était froid mais sec et Altea décida de prolonger son après-midi au soleil. La femme était rentrée dans la maison. Altea savait qu'il lui faudrait aller la voir...mais elle reculait cette échéance. Il lui semblait que d'une certaine façon la femme n'était pas prête à recevoir sa visite.

*Elle va bientôt ressombrer dans ses rêves agités. Je ne vais pas l'y déranger... Qui sait si ce n'est pas là que se trouvent ses pires ennemis ? Dans quelques jours oui, je lui parlerai dans quelques jours...*

Altea allongea les jambes et ouvrit le rouleau de manuscrit qu'elle avait emmené. "Cinq cent cycles à chevak ou les aventures rocambolesques d'une renaissante avide d'appréhender les moultes merveilles du monde d'afterend et qui y connut gloire, fortune, déchéance et misère avant de découvrir l'amour !" *Miam, un chouette après-midi en perspective, et ce soir un peu de fumée de fleur de rêve, pouvait-on imaginer mieux ?*

Nombre de messages : 6 Date d'inscription : 21/06/2007

Elle resta un moment dans cet état entre le sommeil et le réveil. Puis un bruit la fit sursauter et elle ouvrit les paupières, tout en s’asseyant sur sa couche. La faible lueur qu’elle percevait lui indiquait que le jour était entamé et était éclatant, un jour de la belle saison peut-être. Il faisait chaud.
Elle entendit des grattements puis les pas d’un animal qui s’éloignait sans doute un phacochère à la recherche de sa pitance. Des zozios chantaient à l’extérieur et un mélange soyeux de parfums de fleurs lui parvenait.

Elle passa la main dans ses cheveux et sur sa figure. Elle remarqua alors qu’elle avait les cheveux longs et que son visage conservait des cicatrices.
Des tortures comme le lui indiquait ses rêves ?

Son sommeil avait été agité. Des images sans queue ni tête lui revenaient à l’esprit. Elle sentait une présence permanente dans ses songes sans pouvoir lui donner un nom ou une forme précise. Que des couleurs. Un épanchement de couleur. Et des caresses étranges sur sa peau.

Elle se concentra sur les autres impressions. Elle essaya de redessiner les scènes, de les remettre dans l’ordre, de retrouver leur fil.

Avec surprise elle se rendit compte que la troisième strophes de la chanson lui était maintenant connue. A par les images troublantes qui devaient expliquer son sort actuel, elle retint surtout un signe de l’avenir, c’est ainsi qu’elle le percevait : un blason rouge et noir. Oui, cette couleur était prédominante dans ses rêves et elle le sentait, elle lui était familière. Elle revenait souvent sous diverses formes. Elle devait comprendre, peut-être qu’elle trouverait alors les pistes qui la mèneront à son passé perdu.

Elle tendit son bras valide et en tâtonnement avec précaution trouva le pichet d’eau. On avait remplacé celui qu’elle avait cassé. Elle se demandait qui pouvait bien être son bienfaiteur et où elle se trouvait.
Elle porta le récipient à sa bouche et bu goulûment. Elle le reposa et tomba sur un trognon de pain sec imprégné d’une plante aromatique.

Elle se leva et prit sa canne. Elle ne discerna aucune douleur. Elle allait mieux, mais elle avait encore de la peine à marcher correctement.

Elle sortit et cette fois-ci prit des précautions. Elle s’arrêtait à chaque arbre, pour le toucher, pour essayer de l’identifier, elle les comptait et écoutait chaque bruit… ici un écoulement d’eau à peine perceptible, là le chant de petits zozios réclamant leur dîner, là un sentier recouvert de gravillons… Peu à peu, à chaque information, la carte mentale du lieu prenait forme.

Elle trouva une souche et s’assit, ses pensées perdues en elle. Elle se sentait tellement étangère à elle-même. Mais qui était-elle ?

Nombre de messages : 6 Date d'inscription : 21/06/2007

Elle entendit le chant d’un zozio puis le clapotis de l’eau et puis le silence. Elle s’imagina l’amimal plongeant dans la mare en quête de sa proie, un poisson sans doute. Elle posa son menton sur ses mains, et l’air triste elle essaya à nouveau de se concentrer sur ses songes. Les seuls liens qu’elle avait vers son passé, si vraiment c’était le sien.
Etait-ce réellement son père, ce personnage à la barbe naissante et au regard doux ? Etait-ce réellement sa mère cette femme aux cheveux d’embruns, au regard émeraude ?
Elle était dépitée de ne pouvoir fixer les visages.

Elle se pencha en avant et tâtonna le sol. La terre semblait friable.
Elle prit sa canne de fortune et se concentra avec l’énergie du désespoir et traça ce que ses pensées lui commandaient.
Enfin elle posa la canne à côté d’elle et, le cœur battant, plein d’espoir, elle s’accroupit et avança lentement une main. Dès qu’elle toucha une bosse de terre, elle se figea. Pour que cela marche, il falalit être doux, ne pas brusquer les mouvements pour ne pas effacer les sillages.
Lentement, elle suivit les contours qu’elle avait dessinés. Lentement, elle effleura les visages de ses rêves. Et lentement, elle imprégna dans sa tête, son père et sa mère.

Des larmes coulèrent. Elle repassa ses doigts, encore une fois, sur les sillons. Elle repassa encore et encore…. puis elle se rassit.

Pleine de tristesse et de joie, elle se remit à chanter, à tue tête, cette chanson venue de son passé.

Il y a très longtemps
Les enfants courraient sur la Lune
Pas une goutte de sang
Ne tachait le miroir de ses dunes

Il y a bien longtemps
Nul besoin de sentinelles
Aux quatre coins des citadelles
Pour sentir d'où venait le vent

Il y a trop longtemps
Qu'on n'a pas eut le goût du fer
Une langue de feu entre les dents
Pour aiguiser nos prières

Et maintenant
Qu'il n'y a plus de rois mages
Que les braves gens
Ne suivent plus que des sillages

Elle s’arrêta stupéfiée d’entendre la nouvelle strophe.
Oui et maintenant ? Qu’allait-elle faire ?

Nombre de messages : 6 Date d'inscription : 21/06/2007

Elle se leva tout sourire, la décision était prise.

Elle se retourna et, avec précaution, suivit le chemin qu’elle venait de faire, s’aidant de ses pieds, de ses oreilles et de son nez pour retrouver le cabanon qui l’abritait.

Une fois à l’intérieur elle farfouilla, en tâtonnant, de gauche à droite. Plusieurs objets tombèrent et certains se brisèrent au sol. Elle trouva une toile. Elle en fit un baluchon après y avoir fourré le peu de nourriture qu’elle avait trouvée, ainsi qu’une couverture.

Elle noua les bouts et s’immobilisa, enfouie dans ses pensées.
Elle avait déjà vécu cette situation, elle en était sûre.
Petite, elle était partie sur la route, seule, pour retrouver ses parents.
Mais toujours rien de précis, que des impressions.

Elle laissa rouler une larme quand le visage de son père et de sa mère se réimprima sur le fond de ses paupières.

Elle s’essuya la joue.

Le rouge et le noir, voilà la piste qu’elle devait suivre.

Elle balança le baluchon sur ses épaules, prit sa canne et sortit. Peu importait la direction, de toute manière elle ne savait pas encore où se diriger.

Comme un symbole, elle partit tout droit, en traînant la jambe. Pour se donner du courage elle chantonnait la chanson.

Elle les retrouvera, oui elle les retrouvera !